Dans une nouvelle étude, les chercheurs Johanne Nedergård de l’Université de Copenhague et Gary Lupyan de l’Université du Wisconsin-Madison se sont penchés sur le phénomène peu connu de l’anendophasie, ou absence de voix intérieure. Alors qu’on pensait autrefois que chacun possédait un monologue intérieur, des découvertes récentes suggèrent qu’il ne s’agit peut-être pas d’une expérience humaine universelle.
Pour ceux qui vivent sans voix intérieure, les tâches quotidiennes peuvent prendre du temps et être difficiles. « Certains disent qu’ils pensent en images et qu’ils traduisent ensuite les images en mots lorsqu’ils ont besoin de dire quelque chose », explique Nedergård. « D’autres décrivent leur cerveau comme un ordinateur qui fonctionne bien, qui ne traite tout simplement pas les pensées verbalement et que la connexion au haut-parleur et au microphone est différente de celle des autres. »
L’impact sur la mémoire verbale et les rimes
Nedergård et Lupyan ont mené des expériences pour déterminer si l’anendophasie affecte les capacités de résolution de problèmes, en particulier dans les tâches de mémoire verbale. Ils ont constaté que les participants sans voix intérieure avaient des résultats nettement moins bons lorsqu’on leur demandait de se souvenir des mots dans l’ordre, en particulier lorsque les mots étaient similaires en termes de son ou d’orthographe.
De même, dans une tâche de rimes impliquant des images de mots comme « chaussette » et « horloge », ceux qui n’avaient pas de voix intérieure avaient du mal à comparer les sons et à déterminer si les mots rimaient. « Il est crucial de pouvoir répéter les mots afin de comparer leurs sons et ainsi déterminer s’ils riment », explique Nedergård.
S’adapter à la vie sans voix intérieure
Cependant, dans des expériences testant le rôle de la voix intérieure dans le changement de tâche et distinguant des figures similaires, aucune différence n’a été trouvée entre les deux groupes. Nedergård suggère que les personnes sans voix intérieure pourraient avoir développé des stratégies alternatives pour faire face à ces défis.
La signification pratique et comportementale de l’anendophasie reste floue, mais les chercheurs soupçonnent qu’elle pourrait jouer un rôle dans la thérapie, en particulier dans la thérapie cognitivo-comportementale, où l’identification et la modification des schémas de pensée indésirables sont cruciales. « On ne sait toujours pas avec certitude si les différences dans l’expérience d’une voix intérieure sont liées à la façon dont les gens réagissent aux différents types de thérapie », note Nedergård.
Alors que les recherches sur cette condition fascinante se poursuivent, Nedergård espère découvrir si l’absence d’une voix intérieure affecte d’autres aspects du traitement du langage au-delà du son. «Je voudrais étudier si c’est parce qu’ils ne ressentent tout simplement pas l’aspect sonore du langage, ou s’ils ne pensent pas du tout dans un format linguistique comme la plupart des autres», conclut-elle.