Un médicament couramment utilisé pour traiter l’insomnie pourrait permettre de prévenir la dépendance aux opioïdes tout en procurant un soulagement efficace de la douleur, selon une nouvelle étude menée par UCLA Health. L’étude, publiée dans Nature Mental Health, révèle que le suvorexant, un médicament qui bloque les récepteurs cérébraux du neurotransmetteur hypocrétine, a réussi à prévenir les effets addictifs de la morphine chez la souris.
Le suvorexant, généralement prescrit à fortes doses pour induire le sommeil chez l’homme, s’est révélé efficace à des doses beaucoup plus faibles chez la souris. Ces doses plus faibles ont permis de prévenir la dépendance aux opioïdes sans provoquer de somnolence ni affecter la vigilance comportementale.
Le lien entre l’hypocrétine et la dépendance aux opioïdes
L’hypocrétine, également connue sous le nom d’orexine, joue un rôle crucial dans la régulation de l’humeur. Sa libération chez l’homme atteint son maximum lors d’activités agréables et chute en cas de douleur ou de tristesse. Il est intéressant de noter que les personnes atteintes de narcolepsie, une maladie causée par la perte de neurones hypocrétines, présentent une sensibilité significativement plus faible à la dépendance aux opiacés.
Des recherches antérieures ont montré que les humains dépendants à l’héroïne et les souris dépendantes à la morphine développent un nombre plus élevé de neurones producteurs d’hypocrétine. La morphine incite également ces neurones à augmenter leurs connexions aux régions cérébrales liées au plaisir.
Résultats prometteurs du Suvorexant chez la souris
L’étude menée par l’UCLA a révélé que l’administration d’opioïdes avec du suvorexant chez la souris produisait plusieurs résultats positifs :
1. Prévention des modifications induites par les opioïdes dans les neurones hypocrétines
2. Réduction des connexions entre les neurones hypocrétines et les régions cérébrales de récompense
3. Diminution significative de l’inflammation cérébrale induite par les opioïdes
4. Prévention des comportements addictifs, comme la course anticipée pour obtenir des doses quotidiennes de morphine
5. Réduction substantielle des symptômes de sevrage de la morphine
« Le taux annuel de décès par overdose d’opioïdes aux États-Unis dépasse désormais les 80 000, soit plus que les taux annuels de décès par accident de voiture ou par arme à feu », a déclaré l’auteur principal de l’étude, le Dr Jerome Siegel de l’Institut Jane & Terry Semel pour les neurosciences et le comportement humain de l’UCLA Health, de l’Institut de recherche sur le cerveau de l’UCLA et du Département américain des anciens combattants. « Les analgésiques non opioïdes sont capables de soulager une douleur relativement légère. Mais les brûlures graves, le cancer, l’inflammation des articulations, la drépanocytose, les lésions osseuses et de nombreuses autres affections douloureuses ne peuvent souvent pas être traités efficacement avec des analgésiques non opioïdes.
« D’autres études sont nécessaires pour déterminer si les résultats suppressifs de la dépendance observés chez les souris ayant reçu du suvorexant avec de la morphine sont également observés chez les humains, permettant potentiellement un traitement plus sûr et plus efficace de la douleur sans risque de dépendance et de décès par surdose d’opioïdes », a poursuivi Siegel.
L’étude a porté sur 170 souris auxquelles on a administré de la morphine sur des périodes de 14 jours, ainsi que sur des examens post-mortem du cerveau de 5 humains souffrant de troubles liés à la consommation d’opiacés et de 5 cerveaux humains témoins. Bien que les résultats soient prometteurs, des essais cliniques sont nécessaires pour déterminer si le suvorexant sera aussi efficace pour supprimer la dépendance chez les humains qui utilisent des opioïdes pour soulager la douleur que chez les souris.
Cette recherche offre l’espoir d’une avancée potentielle dans la crise actuelle des opioïdes, offrant potentiellement une approche plus sûre de la gestion de la douleur sans risque de dépendance.