À l’exception de Laurent St-Cyr, tous les membres du Conseil présidentiel, avec droit de vote ou pas, ont signé l’Accord du 3 avril 2024. Sans exception, ils l’ont tous violé. Hormis le fait que le document n’ait jamais été publié dans le journal officiel Le Moniteur, les conseillers présidentiels ont dénaturé l’accord avec des pratiques leur permettant de capter le pouvoir tout en maintenant à l’écart les parties participent.
Par Robenson Geffrard
14 nov. 2024 | Conférence : 3 min.
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Les conseillers présidentiels et le nouveau Premier ministre Alix Didier Fils-Aimé (Photo)
L’Accord du 3 avril 2024. La seule base de légitimité du Conseil présidentiel de transition. Sans ce document, rien ne justifie leur présence à la tête de la République d’Haïti. Pourtant, les conseillers présidentiels dirigent le pays sans se soucier de cet accord. Ils prennent des décisions, signent des résolutions qui n’ont rien à voir avec l’accord qu’ils avaient pourtant promis de respecter.
Les deux premières entorses des membres du CPT à l’accord ont été la modification de la majorité décisionnelle qu’ils ont fait passer de quatre à cinq membres sur sept. Ensuite, il ya eu la mise en place de la présidence tournante alors que l’article 4.1 de l’accord stipule que « Le Conseil Présidentiel est coordonné par un de ses membres faisant office de président du Conseil et choisi/élu conformément au « Document portant organisation et fonctionnement du Conseil présidentiel ».
L’Accord du 3 avril implique les secteurs qui ont désigné les conseillers présidentiels dans pratiquement toutes les étapes de la transition. Les membres du CPT, après avoir accédé au pouvoir, ont mis les secteurs à l’écart dans la gestion de la transition. La plupart des partis manifestent se plaignent du fait que le CPT les avait ignorés dans le choix de Garry Conille comme Premier ministre, ainsi que pour le choix d’Alix Didier Fils-Aimé.
Comme des gens qui prêchent dans le désert, les membres des secteurs ont exigé en vain le respect des articles 6 et 8 de l’accord dans le choix du Premier ministre de la transition. Selon l’article 6, « Le/la Premier.ère ministre est nommé.e par le Conseil Présidentiel de la Transition en consultation avec les signataires du présent Accord et d’autres structures politiques et de la société civile intéressées à adhérer audit Accord, sur la base d’une liste d’un (1) nom soumis par chacun des secteurs, ne dépassant pas un total de 15 candidatures… »
L’article 8 stipule : « Le/la Premier.ère ministre, en accord avec le Conseil Présidentiel, choisit les membres du cabinet ministériel conformément aux mécanismes et critères établis. Les secteurs signataires de l’Accord politique et d’autres secteurs seront sollicités pour une liste de compétences en fonction de la feuille de route du Gouvernement. »
Il est même question dans l’accord de la formation d’une assemblée des neuf secteurs impliqués dans la formation du Conseil présidentiel. Cette structure n’a jamais vu le jour.
Si selon l’article 2 de l’accord, la transition se base sur trois instances fondamentales, à savoir le Conseil Présidentiel ; le gouvernement dirigé par un Premier ministre, l’Organe de Contrôle de l’Action gouvernementale, le CPT est sur le point d’avoir en 7 mois son deuxième gouvernement et n’a jamais pu arriver à la mise en place de l’Organe de Contrôle de l’Action gouvernementale.
Il faut souligner cependant que le CPT a pu mettre en place le Conseil électoral provisoire, même si cette institution est incomplète de deux membres. Le Conseil présidentiel a également mis en place le Comité de pilotage de la Conférence nationale, prévu dans l’Accord du 3 avril. La formation du Conseil National de Sécurité (CNS) est toujours dans l’impasse.
Par ailleurs, il y a deux articles dans l’Accord du 3 avril auquel les membres du CPT ne se réfèrent que rarement ou pas du tout. Il s’agit de l’article 12.1 qui indique que le mandat du Conseil présidentiel prend fin le 7 février 2026 et l’article 13 qui soutient que le Conseil présidentiel ne peut bénéficier de la prolongation de son mandat qui démarre à la date de sa prestation de service.
Installé dans leurs fonctions le 25 avril dernier, la présence des membres du CPT à la tête du pays n’a pas fait bouger les lignes. Plus de territoires sont passés sous le contrôle des groupes criminels qui terrorisent la population. Plus de membres de la population sont en insécurité alimentaire…
Appelés à apporter une solution à la crise, les conseillers présidentiels ont provoqué d’autres crises, notamment avec l’implication de trois d’entre eux (Louis Gérald Gilles, Smith Augustin et Emmanuel Vertilaire) dans un scandale de corruption et ils sont actuellement des inculpés dans cette affaire.
Certains responsables des secteurs signataires de l’Accord du 3 avril estiment que l’accord est caduc, prennent leurs distances avec leurs représentants au CPT. Ils annoncent des discussions pour savoir quel comportement adopter dans cette situation.
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