L’impérialisme occidental va sans doute utiliser ses méthodes traditionnelles d’invasion militaire pour façonner à son goût le peuple rebelle d’Haïti et mieux l’aider à sombrer dans le chaos. Ce n’est pas sans raison que l’ancien ambassadeur américain en Haïti James B. Foley», vient de publier au Washington post du 25 mars 2024, un article titré : « Les États-Unis interviendront en Haïti. »
Toute cette histoire a commencé le 7 octobre 2022, lorsque le Premier ministre de facto haïtien Ariel Henry imposé par les Etats-Unis par la filière du Core Group avait écrit une lettre au secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, réclamant le déploiement d’ une mission armée spécialisée brutale, robuste pour mettre fin à la crise humanitaire en cours.
La résolution que le conseil des ministres publia au journal officiel Le Moniteur lit-on : « ce soutien international doit favoriser le rétablissement d’un climat sécuritaire devant permettre de lutter efficacement contre le choléra, la reprise de la distribution de carburant et de l’eau potable, le fonctionnement des hôpitaux, le redémarrage des activités économiques, la libre circulation des personnes et des biens ainsi que la réouverture des écoles »
Part des naïfs, tout le monde savait que la communauté occidentale était le principal commandant de cette demande d’intervention militaire, particulièrement les États-Unis d’Amérique, estimant que leurs agents au pouvoir ne peuvent plus aider à régénérer le système corrompu, pourri agonisant faisant face à une mobilisation populaire grandissante.
Par peur de perdre le contrôle de la situation haïtienne, le triumvirat Etats-Unis, Canada,
La France exhorte leur marionnette Ariel Henry à inviter une force militaire dans le pays sous prétexte d’accompagner la police nationale d’Haïti.
Pour rendre les choses moins évidentes, les États-Unis ont transmis le dossier d’intervention au Canada pour prendre le leadership, qui lui-même l’a remis à la Caricom. Mais malgré les désirs de la Jamaïque et d’autres pays de la Caraïbe qui avaient exprimé leur désir d’envoyer des soldats à un tel projet, ils ont laissé tomber pour se joindre de préférence en tant que médiateur aux négociations des protagonistes haïtiens.
Les États-Unis, en fin de compte, n’ont pas trouvé de preneur pour ce sale boulot, même le Brésil de Lula qu’ils avaient employé en tant que sous-impérialisme en 2004 refusa de le servir à nouveau. C’est dans ce contexte qu’Anthony Blinken a été obligé d’aller jusqu’en Afrique pour embaucher le Kenya qui avait promis d’envoyer plus de 1 000 soldats.
Le président kenyan William Ruto acceptait l’offre de l’administration du président Joe Biden de prendre le contrôle de la force multinationale prolongeant une valeur de 100 millions de dollars. Pourquoi les États-Unis paient-ils le Kenya pour nettoyer les dégâts qu’ils ont causés en Haïti ? se demander certains d’observateurs politiques.
Cette intervention américaine sous couvert du Kenya tarde jusqu’à nos jours à prendre forme et les acteurs de la classe politique pro-impérialiste n’arrivent pas à apaiser le climat.
D’autant plus qu’un mouvement soutenu par des groupes armés ont depuis le 29 février 2024 empêché le Premier ministre Ariel Henry qui était en visite au Kenya de retourner à Port-au-Prince. A ce stade, pour ne pas perdre le contrôle de sa domination criminelle, l’artisan, le chef d’orchestre, l’instigateur de cette intervention est obligé de se démasquer. Et l’ancien ambassadeur américain en Haïti, James B. Foley, a finalement vendu la mèche.
Il est mieux placé que quiconque pour expliquer le complot en cours car il a été, il y a 20 ans de cela le principal organisateur de la dernière occupation américaine et onusienne du pays suite au coup d’Etat américain contre le pouvoir Lavalas. Une occupation qui a duré environ vingt ans.
Dans son article Foley a souligné « Aujourd’hui, Washington tente à nouveau désespérément de mettre en place un arrangement politique transitoire, après avoir trop longtemps soutenu l’incapable Ariel Henry en tant que Premier ministre. Il s’agit d’une course contre la montre et, à mon avis, il est peu probable qu’elle réussisse, ou même qu’elle parvienne
à faire entrer des forces de sécurité internationales dans le pays, sans fournir une couverture militaire américaine »
Selon lui « Dans la crise actuelle, nombreux sont ceux qui appellent à des solutions dirigées par les Haïtiens ou même uniquement par les Haïtiens, mais cela n’est pas réaliste au vu de la situation sécuritaire. Les forces de police haïtiennes, dépassées en nombre et en armement, se sont courageusement battues pour préserver l’État, mais elles risquent de ne pas tenir face aux bandes criminelles qui se sont récemment alliées pour prendre le pouvoir. Dans ces circonstances désastreuses, il est extrêmement difficile d’imaginer la formation d’un gouvernement intérimaire légitime »
Pour renforcer son point de vue, Foley a fait référence à la crise de 2004 qui avait orchestré une occupation américaine suivie de la Minustah. Il voit une certaine similitude « un moment similaire lorsque j’étais ambassadeur des États-Unis en Haïti il y a 20 ans ». « À l’époque, une intervention américaine décisive avait permis d’éviter les pires conséquences. La crise d’aujourd’hui pourrait l’exiger également »
Il suggèrea la même formule de 2004, puisque les militaires étatsuniens, canadiens et français occupaient le territoire haïtien avant de passer la commande aux forces militaires brésiliennes qui dirigeaient la Minustah. « Avec un nouveau gouvernement en place, les Etats-Unis pourraient rapidement transférer la responsabilité de la sécurité à la communauté internationale, en s’appuyant sur un détachement de police kenyane déjà approuvé par les Nations Unies. Mais sans cela, les risques d’un effondrement final et d’une intervention plus importante continueront de croître »
Notre collaborateur Rodhney Robert l’a si bien expliqué la semaine dernière dans son article « Martinique : Hub diplomatique et militaire de la politique étrangère française dans sa lutte contre les réparations en Haïti et dans toutes ses anciennes colonies. » Il écrit : « Que les choses soient claires pour toutes et tous : cette mission à venir en Haïti, clamée ça et là constituée d’une mission de maintien de la paix n’en est pas une. Si telle était le cas, elle aurait été portée sous la bannière de l’ONU, or ce n’est pas le cas : elle est portée par des puissances étrangères, et ce de façon officielle et assumée pour celles et ceux qui savent bien lire entre les lignes, au-delà des grandes déclarations et des communiqués. C’est ce que l’on appelle : une invasion. »
Il poursuit pour dire que « La mission Jeanne D’Arc aussitôt stationnée au port de Fort-de-France, vint ensuite un communiqué, stipulant entre autres : « Les Forces armées aux Antilles restent vigilantes quant à la dégradation du contexte sécuritaire à Haïti. Elles sont en mesure d’adapter leur dispositif en fonction d’évolutions potentielles de la situation. ».
En conclusion, « Il parait évident qu’Haïti porte une nouvelle fois le fardeau des enjeux immenses liés aux réparations pour un monde plus juste et équitable, et il semblerait que la France, ses alliés et ses facilitateurs se trouvent moins onéreux et moins risqués de tenter de faire taire. une nouvelle fois ces revendications légitimes à coups de contingents armées et ce afin de tenter de préserver le statuquo » ajouté-t-il.
Ne soyez pas étonnés si comme en 2004, la France et le Canada accompagnent les États-Unis en cette année 2024 dans un autre périple d’intervention militaire en Haïti, bien avant de passer le contrôle au contingent kenyan qui devrait diriger une mission de « soutien multinational à la sécurité (MSS) » pour humilier à nouveau le peuple haïtien.